TOGU Architecture

« Heaven shall burn »
Exposition de Stéphane PROTIC du 1er Septembre au 15 octobre 2012

http://www.stephaneprotic.com

« Qu’il s’agisse de dessin, de sculpture ou d’installation, il est chaque fois question d’espace – de projection – et de surfaces – de représentation – dans le travail de l’artiste. Extraire, isoler et abstraire les corps du visible consiste à les mettre en scène et en jeu, mais aussi en « vue », dans ce qu’ils exposent en voilant et ce qu’ils dissimulent en divulguant. Dans la pratique, le geste s’attelle à remplir les vides (pages blanches, espaces vacants) par systèmes de soustractions. S’il faut parler d’exhibition, elle se joue alors dans ses propres économies et s’accomplie par la dérobade.
Sur le papier, le projet s’esquisse sous forme de repentirs ciblés, et enveloppes de fragments prélevés du lieu. Dans l’espace, le projet prend son souffle à la manière d’un appel d’air obstruant les voix de contemplation et de communications tout en ouvrant le passage vers un alter mundi. Mise en plein des vides, aspiration des non-lieux, les « gonflables » de Stéphane Protic procèdent d’une entreprise éphémère de marquage, estampage et marouflage précaire de l’édifice.
Le matériau unique, polyéthylène noir instable et volatile, déborde des orifices, caresse les murs et se colle aux parois, gonfle à bloc, inspire et décompresse, vivant en continu dans les réserves d’espace qu’il dessine là, en toile de fond d’un arrière-champ habité des fantasmes provoqués par frustration.
L’espace est saturé, la vue dissimulée et le corps entravé. Si le dispositif semble nous priver, il recèle pourtant plus d’une ouverture possible : entrée en Back room.
C’est en contre-impression que les membres architecturaux, couloirs, annexes et aménagements viennent épouser et contrarier la matière, décalque inversé et pellicule pauvre de ce qui ne laissera pourtant nulle trace. Conserver l’indice par l’empreinte renvoie à cette naissance de l’image en négatif : la chambre noire, le mythe du voile, la légende de l’ombre reportée en souvenir d’un corps (ou d’un lieu) un temps absenté, fixé non plus par projection de lumière mais par système d’extraction et/ou propulsion d’air qui vient ici sculpter l’idée. La Back room prend place dans le travail du sculpteur: non pas double d’un réel perçu, mais contre-moule d’un lieu alors fictionné et mis à nu par effacement et recouvrement.
Ce corps à corps tantôt voué à la célébration d’une mémoire de fait lacunaire, tantôt à l’éphémère victoire d’un rituel d’adieu, n’est pas tant joué d’avance. Au regardeur d’arbitrer : que voir ?
Zone de non droit, de non dits, de non vue, la Back room infiltre les processus adoptés par l’artiste visant à exciter les sens par le suggéré, par l ‘évocation de sous-entendus, provoquant le voyeur ainsi poussé dans ses retranchements et convoqué par le regard dans ce qui ne s’expose pas. Le dispositif anime par système de caches un contenu hypothétique à fantasmer sur les murs, à travers les fenêtres, à l’intérieur même de notre « conscience imageante »1. C’est par l’imaginaire donc que l’œuvre prend acte, lorsque le manifeste se double d’un secret enfoui et appelle à toucher la chaire d’un invisible. Dans l’arrière scène l’auteur planqué souffle l’histoire, au spectateur de se l’approprier: que déjouer ?
En œuvrant par occultation, les corps étrangers de Stéphane Protic s’immiscent comme des repentirs ouvrant l’espace de fiction. A la fois présences sensibles et tenants lieux imaginaires, ils enveloppent un néant gonflé d’énigmes à percer dans l’advenue du regard, dans ce qui manque à l’œil et inconforte les sens pour nous mettre en place, en demeure et au défi d’abstraire. C’est dans les réserves, les reculs, les espaces lacunaires et écarts soulignés qu’une passe se fait jour, et nous convoque dans les vides à pénétrer.»
Leïla Quillacq.
1 J.P Sarte, L’imagination.
2 Pour reprendre les termes de N.Goodman, dans Langages de l’’art

Stephane-PROTIC-1.jpg Stephane-PROTIC-2.jpg Stephane-PROTIC-3.jpg Stephane-PROTIC-4.jpg Stephane-PROTIC-5.jpg Stephane-PROTIC-6.jpg

« Heaven shall burn »
Exposition de Stéphane PROTIC du 1er Septembre au 15 octobre 2012

http://www.stephaneprotic.com

« Qu’il s’agisse de dessin, de sculpture ou d’installation, il est chaque fois question d’espace – de projection – et de surfaces – de représentation – dans le travail de l’artiste. Extraire, isoler et abstraire les corps du visible consiste à les mettre en scène et en jeu, mais aussi en « vue », dans ce qu’ils exposent en voilant et ce qu’ils dissimulent en divulguant. Dans la pratique, le geste s’attelle à remplir les vides (pages blanches, espaces vacants) par systèmes de soustractions. S’il faut parler d’exhibition, elle se joue alors dans ses propres économies et s’accomplie par la dérobade.
Sur le papier, le projet s’esquisse sous forme de repentirs ciblés, et enveloppes de fragments prélevés du lieu. Dans l’espace, le projet prend son souffle à la manière d’un appel d’air obstruant les voix de contemplation et de communications tout en ouvrant le passage vers un alter mundi. Mise en plein des vides, aspiration des non-lieux, les « gonflables » de Stéphane Protic procèdent d’une entreprise éphémère de marquage, estampage et marouflage précaire de l’édifice.
Le matériau unique, polyéthylène noir instable et volatile, déborde des orifices, caresse les murs et se colle aux parois, gonfle à bloc, inspire et décompresse, vivant en continu dans les réserves d’espace qu’il dessine là, en toile de fond d’un arrière-champ habité des fantasmes provoqués par frustration.
L’espace est saturé, la vue dissimulée et le corps entravé. Si le dispositif semble nous priver, il recèle pourtant plus d’une ouverture possible : entrée en Back room.
C’est en contre-impression que les membres architecturaux, couloirs, annexes et aménagements viennent épouser et contrarier la matière, décalque inversé et pellicule pauvre de ce qui ne laissera pourtant nulle trace. Conserver l’indice par l’empreinte renvoie à cette naissance de l’image en négatif : la chambre noire, le mythe du voile, la légende de l’ombre reportée en souvenir d’un corps (ou d’un lieu) un temps absenté, fixé non plus par projection de lumière mais par système d’extraction et/ou propulsion d’air qui vient ici sculpter l’idée. La Back room prend place dans le travail du sculpteur: non pas double d’un réel perçu, mais contre-moule d’un lieu alors fictionné et mis à nu par effacement et recouvrement.
Ce corps à corps tantôt voué à la célébration d’une mémoire de fait lacunaire, tantôt à l’éphémère victoire d’un rituel d’adieu, n’est pas tant joué d’avance. Au regardeur d’arbitrer : que voir ?
Zone de non droit, de non dits, de non vue, la Back room infiltre les processus adoptés par l’artiste visant à exciter les sens par le suggéré, par l ‘évocation de sous-entendus, provoquant le voyeur ainsi poussé dans ses retranchements et convoqué par le regard dans ce qui ne s’expose pas. Le dispositif anime par système de caches un contenu hypothétique à fantasmer sur les murs, à travers les fenêtres, à l’intérieur même de notre « conscience imageante »1. C’est par l’imaginaire donc que l’œuvre prend acte, lorsque le manifeste se double d’un secret enfoui et appelle à toucher la chaire d’un invisible. Dans l’arrière scène l’auteur planqué souffle l’histoire, au spectateur de se l’approprier: que déjouer ?
En œuvrant par occultation, les corps étrangers de Stéphane Protic s’immiscent comme des repentirs ouvrant l’espace de fiction. A la fois présences sensibles et tenants lieux imaginaires, ils enveloppent un néant gonflé d’énigmes à percer dans l’advenue du regard, dans ce qui manque à l’œil et inconforte les sens pour nous mettre en place, en demeure et au défi d’abstraire. C’est dans les réserves, les reculs, les espaces lacunaires et écarts soulignés qu’une passe se fait jour, et nous convoque dans les vides à pénétrer.»
Leïla Quillacq.
1 J.P Sarte, L’imagination.
2 Pour reprendre les termes de N.Goodman, dans Langages de l’’art

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